Le temps de Julie


Le temps de Julie, d'Anne Pierjean
Illustré par Gérard Franquin
Couverture de Christian Broutin 
Flammarion-Père Castor, n°179 (1ère édition en 1987 - toujours en édition)

Le bel oiseau déchiffrant l’inconnu au couple d’amoureux

Les bancs des boulevards extérieurs s’infléchissent avec le temps sous l’étreinte des lianes qui s’étoilent tout bas de beaux yeux et de lèvres. Alors qu’ils nous paraissent libres continuent autour d’eux à voleter et fondre les unes sur les autres ces fleurs ardentes. Elles sont pour nous traduire en termes concrets l’adage des mythographes qui veut que l’attraction universelle soit une qualité de l’espace et l’attraction charnelle la fille de cette qualité mais oublie par trop de spécifier que c’est ici à la fille, pour le bal, de parer la mère. Il suffit d’un souffle pour libérer ces myriades d’aigrettes porteuses d’akènes. Entre leur essor et leur retombée selon la courbe sans fin du désir s’inscrivent en harmonie tous les signes qu’englobe la partition céleste.

André Breton (d'après Constellation N°20 - Le bel oiseau déchiffrant l’inconnu au couple d’amoureux)

Constellations


Constellation N° 1 -  Le lever du soleil
Constellation N° 2 - L'échelle de l'évasion
Constellation N° 3 - Personnages dans la nuit guidés par les traces phosphorescentes des escargots
Constellation N° 4 - Femmes sur la plage
Constellation N° 5 - Femme à la blonde aisselle coiffant sa chevelure à la lueur des étoiles
Constellation N° 6 - L'étoile matinale
Constellation N° 7 - Personnage blessé
Constellation N° 8 - Femme et oiseaux
Constellation N° 9 - Femme dans la nuit
Constellation N° 10 - Danseuses acrobates
Constellation N° 11 - Le chant du rossignol à minuit et la pluie matinale
Constellation N° 12 - Le 13 l'échelle a frôlé le firmament
Constellation N° 13 - La poétesse
Constellation N° 14 - Le réveil au petit jour
Constellation N° 15 - Vers l'arc-en-ciel
Constellation N° 16 - Femmes encerclées par le vol d'un oiseau
Constellation N° 17 - Femmes au bord du lac à la surface irisée par le passage d'un cygne
Constellation N° 18 - L'oiseau migrateur 
Constellation N° 19 - Chiffres et constellations amoureux d'une femme
Constellation N° 20 - Le bel oiseau déchiffrant l'inconnu au couple d'amoureux
Constellation N° 21 - Le crépuscule rose caresse les femmes et les oiseaux
Constellation N° 22 - Le passage de l'oiseau divin

Constellations (22 pochoirs - 1959), Joan Miro

L'air et les songes

Sur cet immense tableau d’une nuit céruléenne, la rêverie mathématique a écrit des épures. Elles sont toutes fausses, délicieusement fausses, ces constellations ! Elles unissent, dans une même figure, des astres totalement étrangers. Entre des points réels, entre des étoiles isolées comme des diamants solitaires, le rêve constellant tire des lignes imaginaires.
 
L'air et les songes, de Bachelard (1943)

Billet-doux

« Vous vous souvenez sans doute bien, madame, qu’Herminius avait prié Clélie de lui enseigner par où l’on pouvait aller de Nouvelle-Amitié à Tendre, de sorte qu’il faut commencer par cette première ville qui est au bas de cette carte pour aller aux autres; car, afin que vous compreniez mieux le dessein de Clélie, vous verrez qu’elle a imaginé qu’on pouvait avoir de la tendresse pour trois causes différentes : ou pour une grande estime, ou par reconnaissance, ou par inclination; et c’est ce qui l’a obligée à établir ces trois villes de Tendre sur trois rivières qui portent ces trois noms et de faire aussi trois routes différentes pour y aller. Si bien que, comme on dit Cumes sur la mer d’Ionie et Cumes sur la mer de Tyrrhène, elle fait qu’on dit Tendre-sur-Inclination, Tendre-sur-Estime et Tendre-sur-Reconnaissance. Cependant comme elle a présupposé que la tendresse qui naît par inclination n’a besoin de rien autre chose pour être ce qu’elle est, Clélie, comme vous le voyez, madame, n’a mis nul village le long des bords de cette rivière qui va si vite qu’on n’a que faire de logement le long de ses rives pour aller de Nouvelle-Amitié à Tendre. Mais, pour aller à Tendre-sur-Estime, il n’en est pas de même, car Clélie a ingénieusement mis autant de villages qu’il y a de petites et de grandes choses qui peuvent contribuer à faire naître par estime cette tendresse dont elle entend parler. En effet vous voyez que de Nouvelle-Amitié on passe à un lieu qu’on appelle Grand Esprit, parce que c’est ce qui commence ordinairement l’estime; ensuite vous voyez ces agréables villages de Jolis Vers, de Billet galant et de Billet doux, qui sont les opérations les plus ordinaires du grand esprit dans les commencements d’une amitié. Ensuite, pour faire un plus grand progrès dans cette route, vous voyez Sincérité, Grand Cœur, Probité, Générosité, Respect, Exactitude, Bonté, qui est tout contre Tendre, pour faire connaître qu’il ne peut y avoir de véritable estime sans bonté et qu’on ne peut arriver à Tendre de ce côté-là sans avoir cette précieuse qualité. Après cela, madame, il faut, s’il vous plaît, retourner à Nouvelle-Amitié pour voir par quelle route on va de là à Tendre-sur-Reconnaissance. Voyez donc, je vous en prie, comment il faut d’abord aller de Nouvelle-Amitié à Complaisance ; ensuite à ce petit village qui se nomme Soumission et qui touche à un autre fort agréable qui s’appelle Petits Soins. Voyez, dis-je, que de là il faut passer par Assiduité, pour faire entendre que ce n’est pas assez d’avoir durant quelques jours tous ces petits soins obligeants qui donnent tant de reconnaissance, si on ne les assidûment. Ensuite vous voyez qu’il faut passer à un autre village qui s’appelle Empressement et ne faire pas comme certaines gens tranquilles qui ne se hâtent pas d’un moment, quelque prière qu’on leur fasse et qui sont incapables d’avoir cet empressement qui oblige quelquefois si fort. Après cela vous voyez qu’il faut passer à Grands Services et que, pour marquer qu’il y a peu de gens qui en rendent de tels, ce village est plus petit que les autres. Ensuite il faut passer à Sensibilité, pour faire connaître qu’il faut sentir jusqu’aux plus petites douleurs de ceux qu’on aime. Après il faut, pour arriver à Tendre, passer par Tendresse, car l’amitié attire l’amitié. Ensuite il faut aller à Obéissance, n’y ayant presque rien qui engage plus le cœur de ceux à qui on obéit que de le faire aveuglément; et, pour arriver enfin où l’on veut aller, il faut passer à Constante Amitié, qui est sans doute le chemin le plus sûr pour arriver à Tendre-sur-Reconnaissance. Mais, madame, comme il n’y a point de chemins où l’on ne se puisse égarer, Clélie a fait, comme vous le pouvez voir, que ceux qui sont à Nouvelle-Amitié prenaient un peu plus à droite ou un peu plus à gauche, ils s’égareraient aussitôt; car, si au partir du Grand-Esprit, on allait à Négligence que vous voyez tout contre cette carte, qu’ensuite continuant cet égarement on aille à Inégalité; de là à Tiédeur, à Légèreté et à Oubli, au lieu de se trouver à Tendre-sur-Estime on se trouverait au lac d’Indifférence que vous voyez marqué sur cette carte et qui, par ses eaux tranquilles, représente sans doute fort juste la chose dont il porte le nom en cet endroit. De l’autre côté, si, au partir de Nouvelle-Amitié, on prenait un peu trop à gauche et qu’on allât à Indiscrétion, à Perfidie, à Orgueil, à Médisance ou à Méchanceté, au lieu de se trouver à Tendre-sur-Reconnaissance, on se trouverait à la mer d’Inimitié où tous les vaisseaux font naufrage et qui, par l’agitation de ses vagues, convient sans doute fort juste avec cette impétueuse passion que Clélie veut représenter. Ainsi elle fait voir par ces routes différentes qu’il faut avoir mille bonnes qualités pour l’obliger à avoir une amitié tendre et que ceux qui en ont de mauvaises ne peuvent avoir part qu’à sa haine ou à son indifférence. Aussi cette sage fille voulant faire connaître sur cette carte qu’elle n’avait jamais eu d’amour et qu’elle n’aurait jamais dans le cœur que de la tendresse, fait que la rivière d’Inclination se jette dans une mer qu’on appelle la Mer dangereuse, parce qu’il est assez dangereux à une femme d’aller un peu au-delà des dernières bornes de l’amitié; et elle fait ensuite qu’au-delà de cette Mer, c’est ce que nous appelons Terres inconnues, parce qu’en effet nous ne savons point ce qu’il y a et que nous ne croyons que personne ait été plus loin qu’Hercule; de sorte que de cette façon elle a trouvé lieu de faire une agréable morale d’amitié par un simple jeu de son esprit, et de faire entendre d’une manière assez particulière qu’elle n’a point eu d’amour et qu’elle n’en peut avoir. »
« Aussi, Aronce, Herminius et moi trouvâmes-nous cette carte si galante que nous la sûmes devant que de nous séparer. Clélie priait pourtant instamment celui pour qui elle l’avait faite de ne la montrer qu’à cinq ou six personnes qu’elle aimait assez pour la leur faire voir, car, comme ce n’était qu’un simple enjouement de son esprit, elle ne voulait pas que de sottes gens, qui ne sauraient pas le commencement de la chose, et qui ne seraient pas capables d’entendre certaine nouvelle galanterie, allassent en parler selon leur caprice ou la grossièreté de leur esprit. Elle ne put pourtant être obéie, parce qu’il y eut une certaine constellation qui fit que, quoiqu’on ne voulût montrer cette carte qu’à peu de personnes, elle fit pourtant un si grand bruit par le monde qu’on ne parlait que de la Carte de Tendre. Tout ce qu’il y avait de gens d’esprit à Capoue écrivirent quelque chose à la louange de cette carte soit en vers, soit en prose, car elle servit de sujet à un poème fort ingénieux, à d’autres vers fort galants, à de fort belles lettres, à de fort agréables billets et à des conversations si divertissantes que Clélie soutenait qu’elles valaient mille fois mieux que sa carte, et l’on ne voyait alors personne à qui l’on ne demandât s’il voulait aller à Tendre. En effet cela fournit durant quelque temps d’un si agréable sujet de s’entretenir qu’il n’y eut jamais rien de plus divertissant. Au commencement Clélie fut bien fâchée qu’on en parlât tant, car enfin, disait-elle un jour à Herminius, pensez-vous que je trouve bon qu’une bagatelle que j’ai pensé qui avait quelque chose de plaisant pour notre cabale en particulier, devienne publique, et que ce que j’ai fait pour n’être vu que de cinq ou six personnes qui ont infiniment de l’esprit, qui l’ont délicat et connaissant, soit vu de deux mille qui n’en ont guère, qui l’ont mal tourné et peu éclairé, et qui entendent fort mal les plus belles choses? Je sais bien que ceux qui savent que cela a commencé par une conversation qui m’a donné lieu d’imaginer cette carte en un instant ne trouveront pas cette galanterie chimérique ni extravagante; mais, comme il y a de forts étranges gens par le monde, j’appréhende extrêmement qu’il n’y en ait qui s’imaginent que j’ai pensé à cela fort sérieusement, que j’ai rêvé plusieurs jours sans le chercher et que je croyais avoir fait une chose admirable. Cependant c’est une folie d’un moment, que je ne regarde tout au plus que comme une bagatelle qui a peut-être quelque galanterie et quelque nouveauté pour ceux qui ont l’esprit assez bien tourné pour l’entendre. »
« Clélie n’avait pourtant pas de raison de s’inquiéter, madame, car il est certain que tout le monde prit tout à fait bien cette nouvelle invention de faire savoir par où l’on peut acquérir la tendresse d’une honnête personne qu’à la réserve de quelques gens grossiers, stupides, malicieux ou mauvais plaisants, dont l’approbation était indifférente à Clélie, on en parle avec louange; encore tira-t-on même quelque divertissement de la sottise de ces gens-là, car il y eut un homme entre les autres qui, après avoir vu cette carte qu’il avait demandé à voir avec une opiniâtreté étrange, et qui après l’avoir entendu louer à de plus honnêtes gens que lui, demanda grossièrement à quoi cela servait et de quelle utilité était cette carte. Je ne sais pas, lui répliqua celui à qui il parlait, après l’avoir repliée fort diligemment, si elle servira à quelqu’un, mais je sais bien qu’elle ne vous conduira jamais à Tendre. »
« Ainsi, madame, le destin de cette carte fut si heureux que ceux mêmes qui furent assez stupides pour ne l’entendre point servirent à nous divertir, en nous donnant sujet de nous moquer de leurs sottises. »                                                     Clélie, Histoire romaine, Paris, 1656, t. I p. 391
Clélie, Histoire romaine, de Madeleine de Scudéry
La carte de Tendre, gravure de François Chaveau (1654)

Tendre est le nom du pays ainsi que de ses trois villes capitales. Tendre a un fleuve, Inclination, rejoint à son embouchure par deux rivières, Estime et Reconnaissance. Les trois villes de Tendre, Tendre-sur-Inclination, Tendre-sur-Estime et Tendre-sur-Reconnaissance sont situées sur ces trois cours d’eau différents. Pour aller de Nouvelle-Amitié à Tendre-sur-Estime, il faut passer par le lieu de Grand-Esprit auquel succèdent les  villages de Jolis-vers, Billet-galant et Billet-doux.

La carte de Tendre : une géographie galante et allégorique

Take it easy !

Relax

Ceux qui m'aiment prendront le train

Ceux qui m'aiment prendront le train, de Patrice Chéreau (1997)

Ah ! Que le temps vienne où les coeurs s'éprennent

Le rayon vert, d'Eric Rohmer (Comédies et proverbes - 1986)
bande-annonce

Prenez soin de vous

  
Prenez soin de vous, Sophie Calle (Biennale de Venise  - 2007)
Suite à des problèmes de type grec, je ne pourrai être votre obligé à Cannes. Avec le festival, j’irai jusqu’à la mort, mais je ne ferai pas un pas de plus. Amicalement. Jean-Luc Godard

Cannes

Barbara Carlotti

Belle de jour

Saint Tropez

Ringo

Ringo, petit atelier de création pour les enfants :

Dessine une petite famille et son chat. Trouve leurs dents et yeux par ici.
©Ringo
Comme sur ce portrait de Saul Steinberg par Irving Penn, découpe un grand bout de carton en rectangle (un peu plus grand que ton visage), dessine un triangle pour le nez et deux rond pour les yeux comme un visage et découpe leur intérieur. Voici ton masque !

Saul Steinberg In Nose Mask, Irving Penn, (1966)  
©Ringo
 Imagine un hibou...
©Ringo
 
Imagine ce petit lémurien en découpant des papiers et en les recollant de façon à le terminer.
©Ringo




Caught Dreaming

Caught Dreaming, de Tony Cragg (2006)
 Fast Particles, de Tony Cragg (1995)

Les yeux du seigneur

Les yeux du seigneur, de Aurélie William Levaux (éditions 5c - 2010)
Derrière les délicats ourlements brodés et sous la couture, il y a l'hymen déchiré et le placenta. Aurélie William Levaux tisse ses rêves d'interrogations douloureuses. Sous le fard de ses paupières, pendant son sommeil tourmenté, l'éternel aiguillon du désir féminin : "faire la maman et la putain ?" Fil conscient, fragile, douloureux, toile écrue et colorée, motifs végétaux évoquant une sexualité onirique et fertile, les entrelacs d'Aurélie W. Levaux enserrent le lecteur dans une psyché trouble, où la bouche de l'enfant tête le sein tandis que les lèvres rubis de la mère s'offrent au plaisir. Aurélie Levaux, dans un miroir brisé qui nous la reflète en facettes multiples et dissonantes, coud à même sa peau un récit extraordinaire de désirs et de vie, et nous livre encore une fois son coeur, cru et tendre comme la main d'un nourrisson.

On songe souvent à Frida Kalho, et à toutes les femmes exceptionnelles qui ont su, dans l'histoire, rendre la complexité du sexe, du désir et de la maternité avec les accents de la vérité et les ornements les plus éblouissants.


Sous les yeux du lecteur, un puissant parfum de mots et de dessins qui s'inhale et nous porte jusqu'aux paradis perdus.

Le sourire qui mord

les éditions Etre cessent...


liste de Beauté :
Liberté Nounours, de Christian Bruel et Anne Bozellec
Jour de lessive, de Christian Bruel et Anne Bozellec
Jérémie du bord de mer, de Christian Bruel et Anne Bozellec
Le petit canard et moi (Noël), de Emilie Christensen
Le petit canard et moi (jeudi), de Emilie Christensen
Hänsel et Gretel, de Jacob et Wilhelm Grimm et Susanne Janssen
Cette histoire avec la vache, de Marlen Haushofer et Katrin Stangl


Some velvet morning

Nancy Sinatra et Lee Hazlewood

Eh ! bien, c'est à cela que tu travailles?


- Eh ! bien, c'est à cela que tu travailles? Des pâtés d'encre! 
Où voyait-elle des pâtés d'encre? Il expliqua:
- C'est du jus de mots.
Elle fit:
- Evidemment! L'encre c'est du jus de mots.
 
Délires, André Baillon

Zonzon pépette, fille de Londres

« Tout marcha bien. Le type, un gros Angliche, lui donna deux guinées et ne se rhabilla pas si vite qu’elle n’eût auparavant le temps de lui chiper son portefeuille. Elle lui laissa sa montre, parce que, demain, il y aurait encore des montres. Son coup fait, elle pensa, comme au temps de Paris :
— Salaud, je t’emmerde.
Elle n’eut pas à remettre de chapeau ; elle n’en mettait jamais. Un coup de pouce au chignon, un coup de poing à la jupe, les mains au tablier où sont les poches, puis en route.
Dans la rue, elle se dépêcha pour rejoindre son homme. Quand il ne la suivait pas, elle savait où le trouver : au Cercle, avec les copains. En chemin, près de la Tamise, elle rencontra le policeman qui, un jour, l’avait coffrée ; lui ou un autre. Comme elle marchait vite, il ne pouvait rien lui dire. Elle avait pour les flics, des idées très précises. Elle tourna la hanche :
— Toi, je t’emmerde !
Ouf ! ce qu’elle suait dans ce cochon de Londres ! Dans ces ruelles, les gens couchaient par terre, et pas tous sur des paillasses : i1 y avait des hommes avec des femmes, des vieux, des jeunes, des nichées de pauv’gosses. Cela puait le poivre. Cela puait aussi comme dans une chambre après l’amour. Elle constata ce qu’elle constatait tous les jours : que beaucoup de ces femmes étaient jeunes, avec de bonnes cuisses et de cette chair encore verte qui plaît aux hommes. Elle pensa :
— Sont-elles bêtes, quand il y a tant de types.
Enfin c’était leur affaire.
On les emmerde !
Au Cercle, elle frappa ses trois coups. C’était bon, le soir, de se retrouver, dans cette espèce de cave, et de blaguer, entre camarades, comme si qu’on arrivait tout droit des ponts de Grenelle. Henry-le-Gosse vint ouvrir. Il tira sa caquette. Il dit :
— Tu sais, ton homme, y s’impatiente.
Elle plaisanta :
— Va donc, je t’emmerde.
Ils étaient au complet, ceux du Cercle : le grand d’Artagnan, Ernest-les-Beaux-Yeux, Valère-le-Juste, Louis le Roi des Mecs, les autres : quelques-uns avec leur môme. Tous ensemble ils s’écrièrent :
— Ah ! voilà Zonzon Pépette.
Après Joseph, qui l’avait eue dès la France mais était mort, ils savaient tous qu’elle avait un fessard comme pas un, une balafre à travers le ventre, et qu’à certain moment, quand on lui avait vu sa balafre, elle roucoulait en tourterelle:
— Oh ! chéri, je t’emmerde.
Il ne restait, à ne pas le savoir, que ce brun d’Artagnan, un prétentieux, qu’elle ne supportait guère.
Pour le moment, c’était Fernand-le-Lutteur. Une seconde fois, après les autres, et à lui seul, puisqu’il était le maître, il dit :
— Ah ! voilà Zonzon Pépette.
Il lui plaqua la main au corsage : si tout était en ordre ? Depuis quinze jours, ils s’étaient flanqué pas mal de gifles et de caresses : ils s’aimaient beaucoup. Il était solide. Il portait, en tatoué sur le bras, un revolver, un autre dans sa poche. Et de plus un casse-tête : un fameux zig. » 

Zonzon pépette, fille de Londres, André Baillon (éditions Cent pages - 2006)

Chat fait quoi ?

Par tous les temps, un peu partout, un petit chat attend. Qui ou quoi ? La réponse aérienne sous forme de pop-up ravira les petits : nous assistons à la naissance d’un beau papillon bleu et jaune. Le choix du chat comme personnage principal se révèle alors pertinent, tant l’animal est connu pour sa patience et ses occupations obscures… Croqué avec précision en traits à l’encre noire, le mignon félin prend de multiples postures dans un décor juste esquissé sur fond blanc en quelques couleurs : troncs d’arbres, mur de planches, rivière qui serpente, etc. Le texte minimaliste aiguise par ses questions la curiosité du lecteur. Mais ce petit album carré coupe court à toute réflexion, tentative de donner un sens à l’attente, en rappelant simplement la joie de profiter de l’instant présent. Faut-il parler d’inanité ? Il s’agit plutôt d’une véritable leçon de philosophie. Un petit rien léger et délicat, qui en dit plus que bien des dissertations ! (Sophie Pilaire - Ricochet)


Du silence à l’attente, et de la poésie à un texte qui se lit comme un poème, les éditions Helium offrent aux tous petits Chat fait quoi ? de Rosie Morse et Charlotte Gastaut. Balade tendre et bucolique d’un chaton. L’économie de moyens graphiques et le petit format du livre contrastent avec son expressivité et sa tendresse. En prime une jolie surprise jaillit des pages pour clore l’attente de notre chaton. (Emmanuel Davidenkoff - France Inter)

Très délicat petit album autour d'un petit chat aux délicieuses postures (notez sur la couverture son trop mignon bout de langue rose qui dépasse quand il se lave la patte). Charlotte Gastaut nous propose ici un travail différent de ce que l'on connaissait d'elle. Elle revient au trait à l'encre, à la ligne épurée et joue avec parcimonie des couleurs. Et c'est très réussi.
Une courte et simple histoire oui mais au vocabulaire et à la syntaxe relativement riches qui me font la conseiller pour 3 ans et plus. Les enfants seront eux aussi dans l'attente de la résolution de l' histoire, dans l'impatience de connaître le motif d'attente du petit chat. 
Un petit album, graphiquement très joli et inventif dans sa forme finale, qui devrait donc fonctionner à merveille. (Bauchette)

J'adore ce petit album carré. Et oui, ça change car d'habitude j'aime les très grands formats. Ici le carré est petit et mignon, à l'image du petit chat.
Le texte de la première partie évoque les haikus japonais, où la neige devient un enchantement, où chaque détail de la vie est une merveille. Puis dans la deuxième partie, on tombe sur quelque chose de plus "français" (par la qualité du texte). "Dès potron-minet, il reprenait sa garde patiente." Les phrases sont plus longues, l'histoire semble se construire un peu plus. L'illustration évolue aussi et on quitte la légèreté de l'air pour s'attarder sur le paysage et les rencontres que fait le petit chat. Beaucoup de blanc, un chat au crayon noir et pourtant des touches de couleurs par-ci par-là attirent le regard sur des détails. C'est aéré, léger, sensible. Et puis il y a la dernière page, à ne surtout pas lire avant la fin pour avoir l'effet de surprise d'un pop-up très coloré. Le pop-up est la cerise sur le gâteau. (Histoire de lectures)

Mon coeur n'est pas dans ma bouche

Socialisme de Jean-Luc Godard
bande-annonce (intégralité du film... en 2 minutes 10 secondes et 4 images)

 Femme fatale de Brian de Palma (2002)

River Man

Nick Drake

Yayoi Kusama

 

 

Soul under the moon

Yayoi Kusama
 Flower D.S.P.S. (1954)
The moon (1953) 

Dots obsession

Yayoi Kusama
Infinity Nets CAY (2001)
 Infinity Nets OQ7 (2000)
White Dots OHK (2000)
The Galaxy (1994)